Résumé :

La conservation-restauration existe depuis l’Antiquité mais ne s’est vue attribué l’étiquette de discipline à part entière, dotée de sa déontologie et de son éthique, que depuis la seconde moitié du XXème siècle. Cette formalisation tardive a pour conséquence l’hétérogénéité flagrante des choix et traitements de restauration effectués mais aussi de la création de lacunes dans la documentation de l’histoire matérielle moderne du patrimoine concerné. Pourtant, si les archives écrites ne nous racontent parfois qu’une partie des travaux, les photographies d’archives peuvent, elles aussi, nous parler.

Le travail de thèse explore les utilisations possibles des photographies d’archives du complexe archéologique des temples de Karnak (Égypte) et plus spécifiquement celles de deux monuments : la Chapelle Blanche de Sésostris Ier et le Kiosque de Taharqa. La recherche se concentre autour de la réécriture de l’histoire des restaurations de ces deux édifices en s’appuyant sur l’utilisation des archives photographiques. La thèse vise à explorer les potentiels d’exploitation et de modification de ces photographies dans des outils numériques (photogrammétrie à partir d’archives, orthomosaïque, montage panoramique numérique) pouvaient apporter de nouvelles informations, afin d’offrir une vision plus précise de l’évolution des anciennes restaurations et de l’état d’altération des deux monuments. A des fins de comparaison, une photogrammétrie du Kiosque de Taharqa et de la Chapelle Blanche de Sésostris Ier a été faite durant la thèse, afin de procéder à des comparaisons à partir de relevés de constats d’état. Ainsi, les données et visuels obtenus à partir des photographies d’archives deviennent le support de constat d’état historicisé, des temps « -1 » (et « -2 ») dont la comparaison à l’état actuel permet de recomposer une histoire des pratiques de la restauration à Karnak.

Composition du jury :

M. Laurent COULON, Directeur d’études, EPHE-PSL, Rapporteur

M. Livio DE LUCA, Directeur de recherche, UPR 2002 MAP CNRS, Rapporteur

Mme Clotilde PROUST, Maîtresse de conférences, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Institut d’art et d’archéologie, Examinatrice

M. Jérémy HOURDIN, Ingénieur de recherche, Centre Franco-Egyptien d’Etudes des Temples de Karnak CFEETK UAR 4172/CNRS, Examinateur

M. François GUENA, Professeur émérite, École nationale supérieure d’architecture de Paris La Villette, Co-directeur de thèse

Mme Anne LEHOERFF, Professeure, Héritage/s UMR9022, CY Paris Université, Co-directrice de thèse

Mme Sigrid MIRABAUD, Chargée de recherche, Direction générale des patrimoines et de l’architecture, Encadrante de thèse

Résumé :

La perception, principalement visuelle, est fondamentale dans l’évaluation du processus de conservation-restauration d’une peinture de chevalet. L’objectif de cette thèse est d’étudier les apports pour le restaurateur de la mesure instrumentale de l’apparence comme outil complémentaire d’aide à la décision et à la traçabilité. On s’intéresse en particulier aux changements d’apparence résultant d’une intervention usuelle : le nettoyage. L’enjeu est de sonder les liens entre perception visuelle et mesures optiques afin d’identifier la combinaison de paramètres physiques représentatifs de la perception lors du processus de restauration. Ainsi, des mesures de couleur, brillant, rugosité et fluorescence – avec des résolutions, géométries de mesures et échelles d’investigation différentes – ont été menées sur un ensemble d’éprouvettes fabriquées spécifiquement pour ce travail de thèse et conçues en collaboration avec des restaurateurs pour être proches de cas réels. En parallèle, une expérience de classement par rangs a permis de travailler plus spécifiquement sur les descripteurs brillant, saturation, jaunissement et homogénéité, couramment utilisés par les restaurateurs. Les données sensorielles, corrélées aux données instrumentales, par une méthode psychophysique, ont permis d’identifier les paramètres physiques les plus représentatifs de ces descripteurs. En outre, une analyse multivariée, l’analyse discriminante linéaire (ADL) combinée à l’analyse de variance multivariée (MANOVA), a permis d’identifier la combinaison des descripteurs physiques la plus adaptée à l’étude des changements d’apparence lors du processus de restauration. Ainsi, il a été identifié que les paramètres relatifs au jaunissement et à la saturation sont les plus informatifs.

Composition du jury :

M. Mathieu HÉBERT, Professeur, Université Jean Monnet St-Etienne – Institut d’Optique Graduate School, Rapporteur

M. Pascal MAMASSIAN, Directeur de recherche, École Normale Supérieure, Rapporteur

Mme Sophie JOST, Maîtresse de conférences, ENTPE – Université de Lyon, Examinatrice

M. Jon Yngve HARDEBERG, Professor, NTNU, Examinateur

Mme Christine ANDRAUD, Professeure, Muséum National d’Histoire Naturelle, Co-Directrice de thèse

M. Stéphane SERFATY, Professeur des universités, CY Cergy Paris Université, Co-Directeur de thèse

Mme Sandie LE CONTE, Ingénieure de recherche, Laboratoire de recherche de l’INP, Co-encadrante de thèse

M. Vincent GAUTHIER, Maître de conférences, CY Cergy Paris Université, Co-encadrant de thèse

Mme Claudia Fritz, Chargée de recherche , Équipe LAM – Lutheries-Acoustique-Musique, Institut Jean le Rond d’Alembert UMR 7190, Sorbonne Université – CNRS, Paris,France, Invitée

Résumé :

Ce doctorat porte sur l’étude de l’altération du smalt, un pigment de synthèse constitué de verre bleu teinté au Co et riche en K. Utilisé du XVe au XVIIIe siècle dans les peintures de chevalet, fresques et sculptures polychromes, le smalt est connu pour sa tendance à perdre sa couleur bleue et à virer au jaune-gris en présence de liant. Cette décoloration irréversible, bien que connue des artistes de l’époque, entraîne des modifications permanentes des œuvres. Si le mécanisme d’altération du smalt a été étudié et est globalement compris, les facteurs influençant ce phénomène, tels que la lumière,
l’humidité, la température, le liant et la présence d’autres pigments, demeurent mal identifiés. Or, dans une perspective de conservation des œuvres, il est crucial de mieux comprendre ces facteurs. Par ailleurs, la restitution de l’état initial des peintures reste une question centrale pour les conservateurs et restaurateurs.

Le premier objectif de cette thèse est de définir les paramètres influençant la dégradation du smalt dans les peintures de chevalet et sur des échantillons modèles. L’interaction du smalt avec le blanc de plomb, pigment blanc largement utilisé à l’époque, a été étudiée, notamment par microscopie électronique à balayage, diffraction de rayons X et spectroscopie d’absorption X au seuil K du Co. Le liant étant une source de protons dans le mécanisme d’altération du smalt, son influence a été examinée en recréant et en vieillissant des échantillons modèles avec différents liants : huile de lin, huile de noix et jaune d’œuf. Ces échantillons ont été analysés pour comprendre les effets du vieillissement sur leur composition. Parallèlement, des coupes transversales de peintures historiques contenant du smalt ont été examinées selon les mêmes méthodes pour valider les résultats obtenus sur les échantillons modèles. La spectroscopie XANES au seuil K du Co a permis de déterminer l’état de coordination des ions Co2+ dans les grains de smalt et d’évaluer leur altération. Le XANES au seuil K du K a également permis d’analyser les transformations subies par le K lors de sa lixiviation, offrant ainsi des indices sur la modification de la matrice silicatée et son interaction avec le liant au cours de l’altération.

Le second objectif de cette thèse est de proposer une première procédure pour simuler numériquement la couleur d’origine des œuvres contenant du smalt altéré. Bien que la
restauration physique de la couleur du pigment soit impossible, des simulations virtuelles peuvent permettre de donner une idée de l’apparence initiale des peintures. Une méthode combinant la cartographie par fluorescence macroscopique de rayons X (MA-XRF), la spectroscopie d’imagerie par réflectance (RIS), la spectroscopie d’absorption X (XAS) et le Machine Learning pour simuler les couleurs originales des tableaux en prenant en compte leurs matérialités a été développée.

Composition du jury :

M. Georges CALAS, Sorbonne Université UPMC, Institut de minéralogie, de physique des matériaux et de cosmochimie, Rapporteur

M. Livio DE LUCA, UPR 2002 MAP – Modèles et simulations pour l’Architecture et le Patrimoine, Rapporteur

Mme Katharina MÜLLER, Université Paris Saclay, Examinatrice

M. Gilles WALLEZ, Sorbonne Université, Examinateur

M. Matthias ALFELD, Delft University of Technology, Examinateur

M. Yves DUMONT, Université Saint-Quentin-en-Yvelines, Examinateur

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