Résumé :

Deux techniques avancées et couramment utilisées en archéométrie : la géochronologie 14C (MICADAS) et la géochimie isotopique du strontium (MC-ICP-MS, Neptune) ont été explorées ici afin d’évaluer la faisabilité et les limites d’adaptation aux problématiques des collections muséales d’instruments de musique de la période Moderne. Ce travail s’est concentré sur les vernis huile de lin/colophane ; le corpus d’étude a été étendu aux vernis de mobilier et d’hippomobiles du début du 18e s. et comprend également des cordes de boyaux anciennes comme témoins matériels de l’histoire des usages. Le volet géochronologie 14C (datation) a débouché sur le développement de protocoles d’échantillonnage et de traitements chimiques adaptés selon la nature des matériaux. Des éléments ont également permis d’approfondir la connaissance sur les objets patrimoniaux analysés et leurs usages (impact de restaurations, réemploi de matériaux, ingrédients, etc.).     Le volet isotopie du strontium (traceur d’origine géographique) a été testé sur des liants organiques du marché actuel. La conservation de la signature 87/86Sr depuis le socle géologique jusqu’à la résine de pin et la colophane (après distillation) a été validée pour des échantillons sol/résine/colophane d’origine connue. Une sélection de colophanes a fourni des mesures 87/86Sr cohérentes avec les cartes géochimiques. Cette étude d’état d’avancement méthodologique sur deux volets montre la possibilité de surmonter des écueils comme la taille de l’échantillon ou les niveaux de contamination. Elle a fait l’objet de trois publications (Durier et al. 2019, 2021, 2022) et ouvre des perspectives pour aborder les questions de la contrefaçon, la retouche, de l’entretien ou la restauration sur l’instrument de musique, et de la provenance des liants organiques utilisés dans les vernis en lutherie, étendus aux autres objets patrimoniaux.

The PhD study presented here explore the feasibility and the limits of adapting two advanced techniques currently used in archaeometry: 14C geochronology (MICADAS) and isotope geochemistry (MC-ICP-MS NEPTUNE), to the issues of the instrumentarium of the Modern period kept in museum collections. It focused on linseed oil/colophony varnishes; the material corpus was extended to varnishes of pieces of furniture and horse-drawn carriages mainly from the early 18th c. and also includes early gut strings as a testimony of the material history of uses. The 14C geochronology study leads to the development of sampling protocols and chemical treatments for analyzing materials according to their nature. The study also provided new insights to deepen the knowledge on the analyzed objects and their uses (impact of restorations, reuse of materials, ingredients, etc.).     The Sr isotope study (geographical provenance) was tested on organic binders from the current market. The conservation of the 87/86Sr signature from the bedrocks to the pin resin and colophony (after distillation) was validated for a corpus of pine soil/resin/colophony with a known provenance. Selected colophony provide 87/86Sr measurements consistent with geochemical maps. The state of advancement in the methodological adaptations for both approaches highlights the possibility to overcome pitfalls such as the sample size or the contamination levels. Three articles were published (Durier et al. 2019, 2021, 2022). This research opens up new perspectives to address the issues of counterfeiting, retouching, maintenance or restoration on musical instruments, and on the provenance study of organic binders for vanishes used in violin making, extended to other Heritage objects.

Composition du jury :

Mme Valérie Daux, Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines – examinatrice

M. David Strivay, Université de Liège – rapporteur

Mme Martine Regert, CNRS/CEA, CEPAM – rapporteur

Mme Irkas Hadjas, ETH Zurich – examinatrice

Mme Pascale Vandervellen, conservatrice au MIM Bruxelles – examinatrice

Mme Christine Hatté, CNRS/CEA, LSCE – Directrice de thèse

M. Stéphane Vaiedelich, Musée de la musique, CRC, CNRS – Co-directeur de thèse

Résumé :

Cette thèse traite de la protection du patrimoine métallique cuivreux. Dans ce contexte patrimonial, il est nécessaire de préserver la couche de produits de corrosion formée en surface du métal, partie intégrante de l’objet, et de son esthétique. Ainsi, la recherche s’oriente vers le développement de traitements organiques innovants et non toxiques, afin de protéger l’œuvre métallique de la corrosion tout en préservant la couche de produits de corrosion (CPC) caractéristique.

De précédentes études ont montré l’efficacité de l’acide décanoïque sur des cuivres historiques qui, appliqué par immersion, forme un complexant hydrophobe par un phénomène de dissolution-reprécipitation de la CPC externe (brochantite). Il a été notamment mis en évidence l’importance de faire pénétrer le traitement dans la profondeur de la CPC.

L’objectif de ce projet est donc d’étudier et d’optimiser la pénétration du traitement à base d’acide carboxylique inhibiteur de corrosion grâce à la mise en œuvre d’un revêtement sol-gel dopé en acide carboxylique afin, in fine, d’améliorer l’applicabilité opérationnelle sur site de ce type de traitement organique.
L’étude est réalisée sur des acides carboxyliques de longueurs de chaîne de 7, 8 et 10 atomes de carbones dont la taille, inférieure ou égale au composé déjà étudié, vont faciliter l’insertion puis la migration dans le sol-gel. Le solvant utilisé est composé d’eau et d’acétone à 50/50 en volume et la matrice silicatée est l’orthosilicate de tétraméthyle (TMOS), composé simple de mise en oeuvre et permettant une adaptabilité des tailles de pores du réseau de silice aux molécules dopantes. Les traitements sont appliqués par trempage (dip-coating) sur des CPC formées durant environ un siècle sur du cuivre et dont les propriétés physico-chimiques sont représentatives des objets corrodés du patrimoine. L’étude des propriétés de ces traitements est conduite suivant trois axes : i) l’étude des acides carboxyliques et de leur réactivité en solution avec les surfaces de cuivre corrodé, ii) les propriétés physicochimiques du solide sol-gel dopé en acide carboxylique et iii) l’étude des mécanismes d’interaction physico-chimiques entre le traitement et la CPC.

Des caractérisations multi-échelles et multi-techniques sont entreprises afin d’évaluer d’abord à l’échelle macrométrique l’hydrophobicité (angle de contact), le changement de couleur (colorimétrie) et la composition chimique des surfaces (thermogravimétrie ATG, Raman, MEB-EDS). La porosité et la répartition des acides au sein de la matrice sol-gel sont évaluées par l’établissement d’isothermes d’adsorption et de désorption de N2 à la température de N2 liquide (porosimétrie BET) sur des monolithes de sol-gels dopés en acides carboxyliques, et la pénétration du traitement dans la CPC est étudiée à l’échelle micrométrique par des analyses sur coupes transverses (Raman, MEB-EDS).

Les résultats montrent que tous les acides carboxyliques employés, soit en solution soit dans les sol-gels, forment des complexes organométalliques à la surface des coupons de cuivre corrodé dont la densité de recouvrement dépend de leur longueur de chaîne. Tous les traitements sol-gels dopés en acide conduisent à l’hydrophobisation des surfaces, sans impact sensible sur le changement de couleur. Enfin, l’étude des CPC par spectroscopie Raman et MEB-EDS sur coupes transverses indique la présence de la matrice sol-gel ainsi que de l’acide – mélange d’acide carboxylique et de carboxylate de cuivre – en profondeur de la CPC externe de brochantite jusqu’à l’interface avec la CPC interne de cuprite.

Ces résultats encourageants ouvrent la voie d’une part vers des tests d’altération sur site afin de déterminer la tenue de ces traitements en conditions représentatives, et d’autre part vers l’étude du développement d’une application par spray qui facilitera l’application sur site.

Composition du jury :

  • Christine Richter, Professeure des Universités, LPMS CY Université
  • Delphine Neff, Directrice de Recherche CEA, NIMBE/LAPA-CEA
  • Thu-hoa Tran-thi, Directrice de Recherche CNRS, NIMBE/LEDNA-CEA
  • Muriel Bouttemy, Ingénieure de Recherche CNRS, Institut Lavoisier, UVSQ Versailles
  • Edith Joseph, Professeure Associée, Université de Lausanne
  • François Mirambet, Ingénieur de Recherche Ministère de la Culture, C2RMF Paris
  • Albert Noumowe, Professeur des Universités, CY Université
  • Emmanuel Rocca, Maître de Conférence, Université de Lorraine
  • Elodie Guilminot, Ingénieure de Recherche, Laboratoire Arc’Antique (invitée)
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